De l’homologation des contrats des sportifs professionnels
Le journal l’Equipe a indiqué que le contrat de Christophe Galtier, en qualité d’entraineur de l’équipe professionnelle de football du Paris Saint-Germain, n’a pas été homologué par la Fédération Française de Football (FHF) via la commission fédérale des éducateurs et entraineurs de football qui s’est réunie le 28 juillet 2022. Pour cause, le Technicien français ne serait pas à jour avec sa formation continue. En attendant, l’avis définitif de la commission, l’entraineur parisien devra donc « se rapprocher du directeur technique national concernant ses obligations de formation continue ». Ayant obtempéré à cette injonction, l’ancien entraineur niçois, a finalement vu son contrat homologué juste avant la reprise du championnat.
Si cette procédure d’homologation n’est pas spécialement connue en Haïti, elle est pourtant un élément fondamental dans les opérations de transfert en Europe, particulièrement en France.
Du latin homologare qui veut dire reconnaitre, l’homologation est, au sens administratif, l’approbation donnée par l’autorité administrative à certains actes pour permettre leur mise à exécution[1].
En France, dans toutes les disciplines sportives gérées par des ligues professionnelles (football, rugby, basket-ball, volley-ball), les instances sportives ont institué une procédure d’homologation des contrats des joueurs professionnels et d’entraineurs[2].
L’article L.222-2-6 du Code du Sport précise que : « le règlement de la fédération sportive ou, le cas échéant, de la ligue professionnelle peut prévoir une procédure d’homologation de contrat de travail à durée déterminée du sportif et de l’entraineur professionnels et déterminer les modalités de l’homologation ainsi que les conséquences sportives en cas d’absence d’homologation du contrat.
Les conditions dans lesquelles l’absence d’homologation du contrat peut faire obstacle à son entrée en vigueur sont déterminées par une convention ou un accord collectif national. »
Cette homologation est prévue comme une condition suspensive[3] à l’exécution desdits contrats[4] et peut donc, suivant le cas, entraver leur entrée en vigueur. A ce titre, il est prévu à l’article 254 de la Charte du football professionnel que le contrat de travail du footballeur est conclu sous condition suspensive de son homologation. Cette procédure permet aux instances sportives de qualifier le sportif afin qu’il puisse participer aux compétitions qu’elles organisent. Ainsi qu’il a été décidé à l’article 2.1 de la convention collective du rugby professionnel « tout joueur percevant une rémunération et/ou des sommes quelconques, autres que des remboursements des frais justifiés, est considéré comme joueur rémunéré et son contrat est soumis à la procédure d’homologation. »
En Haïti, il n’existe pas de procédure d’homologation proprement dite des contrats des sportifs professionnels. Dans l’organisation actuelle du football par exemple, la qualification et la participation aux compétitions organisées par la Fédération Haïtienne de Football (FHF) s’obtiennent grâce à une procédure d’enregistrement et l’octroi d’une licence fédérale. En application de l’article 60 des règlements généraux de la FHF : « Pour pouvoir prendre part aux activités officielles organisées par la Fédération Haïtienne de Football, ses ligues régionales et communales, ou les clubs affiliés, tout joueur, dirigeant, entraineur, préparateur physique, membre organisateur bénévole, membre organisateur volontaire, directeur de match, arbitre ou commissaire doit-être enregistré auprès du Secrétariat de la FHF et être ainsi titulaire d’une licence fédérale régulièrement établie au titre de la saison en cours (…). »
Cette disposition règlementaire a été rappelée dans les règlements du championnat national de Première Division Masculine pour la saison 2020/2021. Pour être habilité à participer au championnat, le joueur doit-être régulièrement inscrit au Secrétariat de la FHF ; il doit avoir signé une déclaration juridique d’intégrité annexée à sa matrice de joueurs et avoir une licence de joueur délivrée par la FHF[5]. Au moment de l’inscription finale, le Club doit surtout communiquer à la FHF : « une liste de 25 joueurs au moins et trente joueurs au plus régulièrement licenciés, enregistrés et liés au Club par un contrat professionnel d’une durée de 1 à 5 ans ou tout au plus par un contrat de prêt [6](…) ».
En Liga espagnole, un fair-play financier a été institué pour sanctionner la gestion des clubs de football professionnels. Au-delà d’un certain plafond salarial, il n’est donc pas possible d’enregistrer les nouvelles recrues notamment. A titre d’illustration, le Fc Barcelone, en grande difficultés économiques depuis plusieurs saisons maintenant n’a pas été en mesure de conserver la légende absolue du Club : Lionel Messi. Cette année, même après avoir activé plusieurs leviers économiques, le Club catalan a certes pu réaliser des opérations de transfert intéressantes, mais ne peut donc toujours pas enregistrer ses nouvelles recrues. Cette procédure d’enregistrement indispensable à la qualification des joueurs pour prendre part aux compétitions officielles en Espagne peut être assimilée à la procédure d’homologation qui s’applique en France. D’autant quand on se rappelle que la procédure d’homologation se base non seulement sur la règlementation sportive applicable en l’espèce (les périodes de transfert, les conditions d’âge, la durée des contrats …), mais aussi sur les mesures de contrôle de gestion mises en place par les instances sportives (plafonnement de la masse salariale, par exemple). Et qu’elle vise surtout la participation des sportifs aux compétitions organisées par les instances.
Les sanctions applicables en cas de défaut d’homologation varient suivant le pays et suivant la discipline sportive. Mais, en général, l’absence ou le refus d’homologation entraine la caducité ou encore la nullité du contrat. En vertu de l’article 256 de la Charte du football professionnel « Tout contrat, ou avenant de contrat, non soumis à l’homologation ou ayant fait l’objet d’un refus d’homologation par le service juridique de la LFP est nul et de nul effet. Les signataires d’un tel contrat ou d’un tel avenant, lorsqu’il est occulte, sont passibles de sanctions disciplinaires. »
Dans la perspective de réforme statutaire et réglementaire engagée à la FHF dans le cadre du processus de normalisation mis en œuvre par la FIFA, il serait opportun d’envisager la mise en place de mécanismes efficaces de contrôle des activités des Clubs en vue d’assurer une meilleure protection des joueurs et des entraineurs de football et aussi de préserver l’intégrité des compétitions nationales. Ces problématiques devront intéresser plus largement tous les acteurs dans le but de parvenir à un développement effectif du sport haïtien.
Nathan Laguerre, av
Spécialiste en droit du sport
[1] Gérard Cornu, « Vocabulaire juridique », PUF, Quadrige, 10e édition mise à jour, Paris, 2015, page 509.
[2] Charles Dudognon et al., « Dictionnaire juridique du sport », Dalloz, Juris éditions, 2013, page 192.
[3] Événement futur et incertain dont dépend l’efficacité d’un droit
[4] Jean-Remi Cognard, « Contrats de travail dans le sport professionnel », Juris éditions, CNOSF, CDES, Dalloz, Paris, 2012, page 40.
[5] Art. 3.0 FHF/COCHAFOP/Règlements des Championnats Nationaux (Saison 2020/2021).
[6] Art. 3.1 FHF/COCHAFOP/Règlements des Championnats Nationaux (Saison 2020/2021).
1 Comment
Kerbson Louis
Bravo !!